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Son: En transition vers des lieux de production

Dernière mise à jour : 15 oct. 2020



L'autobus, un moyen de transport. Avez-vous remarqué que dans l'autobus, on n'y entend pas de petits «clac clac» des touches de clavier? On entend les ronronnements du moteur, ses soupirs, les cliquetis de la carroserie, le lecteur de cartes, de la monnaie qui tombe, des téléphones qui sonnent, la musique de notre voisin, des conversations plus ou moins animées et «la madame» à l'intercom qui nous renseigne sur le nom du prochain arrêt, mais pas le «clac clac» des touches de clavier. Avez-vous remarqué que dans l'autobus, contrairement au train, à l'avion et même quelques voitures, il n'y a pas de table? Il n'y nul part où poser son ordinateur, le moyen de production contemporain par excellence. Ce n'est pas un endroit qui a été construit pour être productif. Au contraire, c'est un des seuls endroits où être productif est difficile: nos corps tremblent à chaque crack dans la route, il n'y a nul part où brancher ses machines, tenter de lire rend certains malades... Simplement, ce n'est pas un endroit où l'on s'attend à ce que les gens soient productifs (même si certains d'entre nous (comme moi) s'entêtent de temps à autre à continuer d'écrire leur dissertations sur leur téléphone pour sauver du temps). D'ailleurs, si l'on observe quelqu'un avec son ordinateur sur les cuisses, non seulement cette personne «détonne» du reste de la scène, mais nous penserons probablement qu'elle doit être désespérée de finir son travail. Vous savez, ça prend de la motivation pour taper des choses sur son ordinateur en autobus. Au moindre nid-de-poule, il pourrait s'envoler de nos mains! (C'est d'ailleurs un évènement auquel j'ai assisté avec horreur. L'ordinateur de l'étranger y a miraculeusement survécu.)


En revanche, l'autobus est un endroit (mobile) de transition entre des lieux de production: les lieux où l'on produit formellement, la tour de bureaux par exemple; et les lieux où l'on produit informellement, comme la maison, un café, etc. Lors de mon enregistrement, j'étais partie de la maison pour m'en aller, justement, «au travail», une tour de bureaux fédéraux, pour consulter quelques documents non-numérisés qui me semblaient importants pour effectuer mon travail plus rapidement. En fait, je me suis dit que c'était probablement une bonne idée d'aller les consulter, si je voulais être fonctionnelle. Par son caractère de lieu de transition et de non-production, face à la productivité, l'autobus se présente comme un refuge où tout ce qu'on attend de vous est de la courtoisie. Malheureusement même ce refuge a ses limites. Si la productivité, elle, ne peut pas s'infiltrer partout par elle-même, le temps, lui, il le peut. C'est le master hacker. Il ouvre tous les endroits à la productivité. Si je m'obstine parfois à continuer d'être productive dans l'autobus, c'est parce que je suis bel et bien obsédée avec le temps que je vais perdre assise, là, à ne «rien faire». Dans l'autobus, il n'y a pas de tables. Il y a un afficheur géant qui défile les noms des arrêts.... et l'heure.


Enfin, ce n'est pas souvent que je produis dans l'autobus, donc en général, il demeure le fameux refuge dont je parle. Avec la pandémie, le safe haven que représente l'autobus a pris encore plus d'importance dans mon esprit. Maintenant, je n'ai plus besoin de «transitionner» entre mes lieux de production. Tout se fait de la maison. La «pause obligatoire» de 45 minutes que je prenais dans l'autobus n'existe plus. Je n'ai plus d'excuse de ne pas être en train de produire, de ne pas être productive. Je n'ai même pas besoin de me lever de ma chaise! Pas surprenant que je «vire folle». Ça me manque les trajets en autobus.

 
 
 

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